Exit "ethnique" by Kenza Aloui

kenza aloui

Kenza est auteure, chroniqueuse, prof et productrice.

Le mot ethnique est partout : de la mode à la beauté, en passant par la cuisine et la décoration, il est véritablement devenu un adjectif indissociable de nos références esthétiques. Pour autant, est-ce qu’on sait vraiment dire clairement à quoi il renvoie ? Quand je demande à mon ami Google de me montrer des photos de « beauté ethnique » je tombe sur une sélection d’images assez éclectique : Aishwarya Rai pour une pub l’Oréal, Lupita Nyong’o sous toutes ses coutures, Rihanna pour une crème de jour Nivea, mais aussi Kim Kardashian en parure indienne …  A leurs côtés, tout un tas de visages des quatre coins du monde, souvent aux cheveux frisés ou crépus, qui n’ont en réalité comme seul point commun celui de ne pas être « caucasiennes ».
Notre vieil ami le Larousse définit l’ethnique comme relatif à l’ethnie, groupement humain qui possède une structure familiale, économique et sociale homogène, dont l’unité repose sur une communauté de langue, de culture et de conscience de groupe. 
Lupita Nyong’o est mexico-kenyane, Rihanna vient de l’île de la Barbade et Aishwarya Rai est indienne. Elles sont loin d’appartenir à un groupement humain homogène, uni par une même langue, une même culture ou une quelconque conscience commune. Ce sont simplement des beautés « non-blanches » en somme, auxquelles le marché de la beauté attribue, de façon aussi pratique qu’englobante, le terme de « beautés ethniques », un peu comme la file « Reste du monde » dans les aéroports européens.
Depuis plusieurs années maintenant, l’offre de produits de beauté et de services associés destinés aux populations dites métissées, dans une définition strictement non-caucasienne du terme, est en plein essor. Cette croissance a porté avec elle l’utilisation à tout va d’un mot qui n’a aucun sens sorti de son contexte sociologique, et qui révèle une forme de racisme ordinaire basé sur une simplification des identités et des esthétiques non-occidentales. Pour faire disparaître ce terme, c’est d’abord aux premier.e.s concerné.e.s d’arrêter de l’utiliser pour qualifier leur travail et de se dissocier de l’appellation ethnique. 
Si on se tient à la définition du mot ethnique, toute personne et toute forme de beauté peut être considérée comme ethnique, tout dépend du point de vue depuis lequel on se place. Si les indiennes, les kenyanes, les barbadiennes sont considérées des beautés ethniques aux yeux des acteurs occidentaux de la beauté, pourraient-ils imaginer à l’inverse que des anglaises, des américaines ou des suédoises soient perçues comme des beautés ethniques de l’autre côté du monde ? Car au final, c’est d’exotisme relatif qu’il s’agit ici et rien d’autre.
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